Bâti au fond d'une petite valléee perchée, ce Château-Musée Louis Phillipe en briques rouges s'élève en surplomb de la Bresle, entre forêt et village. Au Moyen Âge, le château d'Eu (castrum Auga) primitif était un des éléments essentiels pour la défense du duché de Normandie sur sa frontière nord, face au comté de Flandre. Le comté d’Eu, au fil des siècles, fut la propriété de prestigieuses familles.
"En 1480, un modeste manoir est élevé par Jean de Bourgogne sur les ruines du vieux castel. Un siècle entier s'écoulera avant la construction d'un vaste et somptueux château. Henri Ier de Lorraine dit « le Balafré » (1550-1588), duc de Guise, est à l’origine de la construction du château à plan en "U" en 1578, aidé en cela par son épouse Catherine de Clèves (1548-1633), dont la famille avait la possession du comté d’Eu. Cependant, une seule aile et la moitié du corps de logis central seront réalisées. Le château actuel n'est donc qu'une aile de la bâtisse prévue initialement. La princesse Anne Marie Louise d’Orléans, duchesse de Montpensier dite “la Grande Demoiselle” achète le comté pairie d’Eu en 1660 et entreprend rapidement de grands travaux de confort et d’embellissement au château d’Eu. Elle fait aménager un jardin à la française, avec dans le parc un petit château, qui devient très vite la ménagerie, et un pavillon permettant à la princesse d'admirer la mer. Sa riche collection de portraits est un des apports les plus profonds apportés au château.
Sans descendance de son union cachée avec Monsieur de Lauzun, la “Grande Mademoiselle” fait donation du comté d’Eu au duc du Maine, aîné des enfants illégitimes de Louis XIV et de Madame de Montespan. En 1775, Louis-Jean-Marie de Bourbon, duc de Penthièvre hérite du domaine d’Eu et le transmet à sa fille unique Marie Adélaïde, duchesse d’Orléans. De 1793 à 1814, la duchesse d’Orléans, veuve de Philippe-Egalité, est dépouillée de son domaine. A son retour en France, lors de la Restauration des Bourbons, elle rentre en possession de ses biens et conserve le château d’Eu jusqu’à sa mort en 1821. Son fils Louis-Philippe en hérite et commence dès 1828 à reconstruire le château d’Eu. L’architecte Fontaine régularise la façade et double la largeur du château. A partir de 1830, Eu devient résidence royale au même titre que Saint-Cloud ou les Tuileries. Le roi “citoyen” séjourne souvent au château d’Eu pour les vacances en famille et y tient même quelquefois le conseil des ministres. Louis-Philippe y reçut deux fois la reine Victoria en 1843 et en 1845 sous le signe de l’Entente cordiale.
Après la chute de la Monarchie de Juillet, le château s’enfonce dans un profond sommeil. Le domaine est confisqué en 1853. Le domaine est rendu en 1872 au comte de Paris, petit-fils de Louis-Philippe et Chef de la Maison d’Orléans. Celui-ci charge Viollet-le-Duc d’aménager le domaine et le château entre 1874 et 1879. En 1886, le comte de Paris est contraint de quitter Eu pour l’exil en raison d’une nouvelle loi d’exil. A son décès en 1894, son fils Philippe, duc d’Orléans (1869-1926) devient Chef de la famille et hérite du château sans pouvoir y résider puisque exilé. Un important incendie ravage toute la partie sud du château en 1902. En 1905, le duc d’Orléans vend le château au prince Gaston d’Orléans, comte d’Eu, petit-fils de Louis-Philippe et époux de la princesse héritière du Brésil. Le comte d’Eu fait restaurer le château et l’habite avec son épouse et leurs trois fils princes d’Orléans-Bragance.
En 1922, le prince Pedro d’Alcantara d’Orléans-Bragance, fils aîné du comte d’Eu, hérite du château et s’y installe avec la comtesse Elisabeth Dobrzensky de Dobrzenicz et leurs 5 enfants. Au décès de la princesse en 1951, le château devient la propriété de ses 5 enfants : la comtesse de Paris, la duchesse de Bragance, la princesse Thérèse, le prince Pedro Gastao et le prince Joao. En 1954, les princes d’Orléans-Bragance cèdent le château à la Société d’Etudes Historiques Dom Pedro II qui la cède à son tour en 1962 au département de la Seine-Maritime. En 1964, la ville d’Eu achète le château. En 1973, la municipalité y aménage sa mairie et crée le musée Louis-Philippe destiné à recueillir les souvenirs des princes d’Orléans et de la Monarchie de Juillet. De nos jours, si la famille d’Orléans n’est plus propriétaire du château d’Eu, le Pavillon Montpensier appartient encore au prince Michel d’Orléans, comte d’Évreux."
Le Château-Musée Louis-Philippe Ier redonne vie à cette demeure royale grâce à des collections réunissant mobilier, porcelaine, orfèvrerie, tableaux et souvenirs historiques attachés à Louis-Philippe et sa famille, à la première Entente Cordiale, mais aussi au Brésil grâce à des souvenirs issus de la famille impériale de ce pays.
Le Château-Musée se compose d'un corps de logis prolongé à chacune de ses extrémités, par deux pavillons. La partie centrale est presque rectiligne, les pavillons des extrémités étant en retrait côté cour et en saillie côté parc. L'ensemble est édifié en brique et pierre et couvert de combles en ardoise, dans un style typique de l'architecture du xviie siècle et du style Louis XIII. À l'intérieur du château, on remarque en particulier la Galerie des Guise, au décor entièrement reconstitué au début du XXIe siècle pour servir d'écrin à une exceptionnelle collection de 46 portraits représentant des personnages liés à l'histoire du château.
L'histoire du parc est intimement liée à celle du Château. La présence des comtes et comtesses d’Eu a largement façonné le territoire entourant le château. Le parc, dont la vision se résume aujourd’hui trop souvent au jardin à la française, a longtemps été la tête de pont d’un vaste domaine. Ce dernier, bien qu’il n’ait plus sa taille d’autrefois, reste un élément majeur du patrimoine eudois. Installé à flanc de coteau, il est aménagé en terrasses. Au XIXe siècle, des essences exotiques et des conifères de collection sont introduits. Les hêtres qui constituent la majorité du boisement actuel en font le "marchepied" de la forêt d'Eu si proche. Les alentours du château sont exceptionnels. Les terres qui l’environnent sont l’occasion de nombreuses promenades.